Les préparations de thés glacés

L'été c'est le moment de se répéter : non, le thé glacé n'est pas une voie vulgaire réservée aux thés de bas étages ! Bien au contraire, ce sont même les thés de grande classe qui s'y prêtent le mieux. Là encore je me répète, mais il n'y a pas de méthode, de recette idéales pour préparer un thé. Il y a une multitude de possibilités en jouant sur les différents paramètres d'infusion, et les diverses méthodes de préparation de thés froids sont justement des possibilités parmi tant d'autres, des possibilités qui peuvent même avec certains thés s'avérer bougrement efficaces !!
Ainsi, cet article se situe dans la continuité de mes précédents articles (que vous trouverez dans la colonne de droite) sur la préparation du thé japonais.

1. "On the rocks"

Solution la plus universelle, tous les thés s'y prêteront très bien. C'est aussi la méthode la plus rapide. Si la force de l'infusion chaude et la proportion de glaçons sont bien dosés, on obtient un très bon thé glacé, équilibré, aux caractéristiques très proches de celles d'une infusion classique. Plutôt que de verser directement de la théière dans les tasses remplies de glace, je conseille de passer avant par un pichet pour refroidir un peu le thé.
 Dans la pratique ce n'est pas toujours si simple, et le dosage n'est pas simple à trouver. Je dirais que c'est une bonne méthode pour se faire une grande tasse de thé, pas trop fort, un grand yunomi plein de glaces, une théière bien remplie. Vite fait bien fait.
Mais cette méthode n'est sûrement celle qui fera profiter au mieux d'un thé. Pour profiter au mieux des possibilités du thé glacé et des caractéristiques des feuilles, je conseillerais plutôt les préparations suivantes.
Exemples de thés recommandés "on the rocks" :
- Ce n'est pas la méthode que je recommande en particulier, mais je dirais que des thés assez simples mais puissants et riches en arômes, comme les Yamakai de Ôma ou de Takayama conviendront bien.
- Sencha de Shimizu, Oku-yutaka : thé de montagne avec de la force, une bonne torréfaction mais aussi les arômes sucrés du cultivar.

2. Infusion à l'eau froide, "mizudashi"

 Solution la plus simple. Infusion à l'eau froide dans une théière, avec un dosage de feuilles un peu plus fort, 5 à 15 minutes selon le thé. C'est la méthode qui prend le plus de temps, et qui possède aussi l'inconvénient de devoir utiliser de l'eau minérale, l'eau n'étant pas bouillie, le robinet est à éviter (il faut au moins que l'eau soit filtrée). C'est bien sur la méthode qui met le plus en avant l'umami, mais aussi les arômes de certains cultivars au parfum particulier. Les thés très "verts", peu torréfié, ceux avec peu d'umami ou de parfum, ne conviendront pas. C'est la solution de choix pour les fukamushi (qui en plus donneront un résultat très rapidement), mais aussi à l'inverse pour les thés très haut de gamme (vous me direz, de toute façon avec un thé très haut de gamme, on peut infuse de très diverses manières avec succès, certes), et les thés types kama-iri avec flétrissement et légère oxydation.
Exemples de thés recommandés en mizudashi :
- Sencha de Ôkawa, Kogane-Midori : exemple parfait, le mizudashi est même de loin la meilleure méthode pour ce thé hors-norme.  2 ou 3 infusions à froid, puis infusions très chaudes.
- Wulong de Hon.yama, Kôju : les arômes de raisin de ce thé ressortent tout particulièrement dans une infusion à froid
- Sencha de Tamakawa, Sôfû, en fait, ce type de cultivar très parfumé donne des résultat étonnant à froid. Même chose pour le Kôshun de Tamakawa ou bien Shimizu.
- Sencha de Yame, Oku-yutaka, on change de registre, mais avec ce type de fukamushi ombré, avec beaucoup d'umami, ici les arômes fruité de Oku-yutaka, le mizudashi donnera d'excellents résultats en quelque minutés seulement.
- Thé noir fumé de Shimada : les saveurs de fumé et celles de tourbes rappelant le whisky apparaissent alors de manière extrêmement claires.

3. Refroidissement rapide

 Petite quantité d'eau très chaude dans la théière, puis ajout rapide de glace directement dans la théière pour refroidir en quelques secondes, puis laisser infuser quelques minutes. C'est une méthode un peu plus difficile peut-être mais qui donne des résultats excellents, avec une mise en avant importante des arômes et parfum en after-taste. C'est la méthode qui donnera globalement les meilleurs résultats avec la plupart des thés, et celle que je recommande en premier lieu.
Exemples de thés recommandés en refroidissement rapide :
- Sencha de Tamakawa Kôshun : oui, je ressers le Kôshun, mais avec cette méthode il est vraiment formidable.
- Sencha de Kawane, Oku-hikari : cette excellente méthode permet de s'attaquer aussi à des thés qui paraîtraient plus difficile en thé froid.
- Tamaryokucha de Ureshino, Sayama Kaori : dans le même ordre d'idée que le Kawane.
- Sencha de Mariko, Kôshun : encore Kôshun !!! oui, c'est un cultivar qui gagne beaucoup froid. Celui de Mariko est moins torréfié que les précédents, ainsi, un simple mizudashi est plus difficile.

Et cætera, et cætera. Essayez-en plein, vous aurez sûrement beaucoup de bonnes surprises !

4. Infusion aux glaçons "kôridashi"

 La méthode de luxe. A réserver pour les très bons thés. Des glaçons sont simplement posés au dessus des feuilles. Il suffit d'attendre que cela fonde, même partiellement. Cette solution demande un peu plus de patience. Bien sûr on met en avant l'umami, mais aussi la longueur en bouche. Ce ne sera pas l'idéal encore une fois pour les thés très "verts".(il s'agit d'un pendant plus lent encore que la méthode "susuridashi" avec laquelle on fait infuser dans une minuscule quantité d'eau froid).
Exemples de thés recommandés en "kôri-dashi" :
- Tôbettô : c'est de toute façon un thé qui sera excellent quelque soit la préparation. Mais comme ceci vous profiterez d'une manière encore différente de sa force et de sa douceur.
- Sencha Tamakawa, Yamakai : Comme le grand frère Tôbettô, puissance et douceur, plus les superbes arômes de Yamakai. 
- Sencha de Wazuka, Saemidori : Très dense, mais la forte douceur umami de Saemidori est bien mise en relief par les arômes végétaux de ce cultivar. Ce sencha n'étant pas ombré, on ne retrouve pas les arômes d'algues nori qui, selon moi, sont un peu gênantes sur un thé froid.


Enfin, devant le potentiel des "thés glacés", il serait dommage d'en profiter durant l'été uniquement...

Commentaires

  1. Merci! Très intéressant! et belles photos, comme d'habitude! Je vais essayer le refroidissement rapide et kôridashi. Je n'ai toujours fait que mizudashi :)

    RépondreSupprimer
  2. Très intéressant cet article par ces chaleurs, merci pour ces explications si claires, je vais tester cela

    RépondreSupprimer
  3. Merci, j'ai testé le refroidissement rapide avec le Hon.yama de Okawa-Oma, cultivar Yabukita. Pour un première, le résultat était probant !

    Florent, j'ai une question pour vous. Des infusions à froid de type mizudashi, avec moins de feuilles et plus de temps d'infusion, peuvent-elles être intéressantes pour un sencha ? Ou on ne développera pas plus de choses qu'avec les méthodes déjà exposées ?

    RépondreSupprimer
  4. Bonjour Geoffroy,
    D'une manière générale, les meilleurs thés glacés seront faits avec des thés aux cultivars plus aromatiques (Koshun, Yamakai, Sofu, etc).
    L'infusion longue mizudashi à surtout l'avantage de permettre la préparation de quantités plus importantes. Ensuite, là encore selon les cultivars, les résultats peuvent être très bons aussi, Koshun, 7132, etc. Ca peut être très bon avec certains kama-iri cha.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés